Concert Aïda du 19 octobre
PROGRAMME
DARIUS MILHAUD (1892-1974)
Le Bœuf sur le toit, op. 58
WOLFGANG AMADEUS MOZART (1756-1791)
Concerto pour hautbois en do majeur, KV 314
1. Allegro aperto
2. Adagio non troppo
3. Rondo : Allegretto
GEORGES BIZET (1838-1875)
Symphonie n°1 en ut majeur
1. Allegro vivo
2. Adagio
3. Allegro vivace
4. Allegro vivace
Durée approximative du concert : 1h45
DISTRIBUTION
Bobby Cheng, hautbois
Antony Hermus, direction
Orchestre national du Capitole de Toulouse
BIOGRAPHIES
Antony Hermus
Chef d'orchestre désigné de l'Orchestre national de Belgique, Antony Hermus endosse également les rôles de Chef invité principal de l'Orchestre du Nord des Pays-Bas et de Chef invité principal de l'Opera North. Figure de proue de la vie musicale néerlandaise, il dirige tous les grands orchestres néerlandais, dont le Royal Concertgebouw, la Radio philharmonique néerlandaise, le Residentie Orkest et l’Orchestre philharmonique de Rotterdam.
Antony Hermus collabore également avec de nombreux orchestres distingués à travers le monde : l’Orchestre philharmonique royal, l’Orchestre symphonique écossais de la BBC, l’Orchestre national de Lyon, l’Orchestre national danois, l’Orchestre Philharmonia, l’Orchestre de la Suisse Romande, l’Orchestre symphonique de Bamberg, l’Orchestre symphonique de Melbourne ou encore l’Orchestre philharmonique de Seoul.
Antony Hermus a dirigé de nombreux opéras tout au long de sa carrière à travers l'Europe, notamment à Stuttgart, Strasbourg, Göteborg, à l’Opéra-comique de Berlin, au studio Opéra de Paris, à Essen et au Nederlandse Reisopera. Directeur musical à Dessau à partir de 2009, il termine son mandat à l'été 2015 avec son premier cycle de L’Anneau de Nibelung et sa promotion au poste de Chef d'orchestre honoraire.
Pour Antony Hermus, la musique est un élément essentiel de la vie et de la société. Repoussant sans cesse les limites de la programmation traditionnelle des concerts, Antony a participé à de nombreux projets novateurs. Ses idées ont donné vie à des concerts primés « Scratch » et des premières représentations en Allemagne du projet Tweetfonie (52 premières mondiales en une journée) lors de sa résidence au Festival international Kurt Weill.
Antony Hermus a étudié le piano avec Jacques de Tiège au Conservatoire de musique du Brabant et la direction d'orchestre avec Jac van Steen et Georg Fritzsch. Il éprouve une réelle passion pour la transmission. Professeur invité au Conservatoire d'Amsterdam, il participe au programme « Master national de direction d’orchestre », tout en endossant le rôle de Conseiller artistique de l’Orchestre national des jeunes des Pays-Bas.
Bobby Cheng
Chi-Yuen est actuellement hautbois solo de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse, où il est nommé à l’unanimité en 2016 par leur directeur musical, Tugan SOKHIEV. Il collabore régulièrement en tant que hautbois solo au BBC Symphony Orchestra (Londres), l’Orchestre National de France, l’Orchestre de Paris ainsi que le London Symphony Orchestra.
Il s’est produit en soliste avec l’Orchestre philharmonique de Thaïlande, l’Orchestre philharmonique de Aspen, l’Orchestre de Chambre de la Corée ainsi qu’avec l’Orchestre National du Capitole de Toulouse. En 2018, il a joué « Extase »,, le concerto pour hautbois de Qigang CHEN, au National Centre for the Performing Arts à Pékin, à l'invitation du compositeur lui-même. Il s’est également produit en récital à travers l’Europe, ainsi qu’aux États-Unis et en Asie.
Né à Hong-Kong, Chi-Yuen Bobby CHENG commence le hautbois avec Song-Lam YIU. Il intègre la Hong Kong Academy for Performing Arts dans la classe de YIU où il obtient son Bachelor Degree avec la mention « First Class Honours ». Il entre en 2014 en master au CNSM de Lyon dans la classe de Jean-Louis CAPEZZALI et Jérôme GUICHARD, et obtient son master avec la mention « Très bien avec félicitations du jury à l’unanimité ». Il a également pu bénéficier des conseils de Gordon Hunt, Christian Schmitt, François Leleux, Thomas Indermühle, ainsi que Maurice Bourgue et a pu travailler avec Jacques Tys regulierement.
Durant ses études, il est lauréat de nombreux concours internationaux ; il remporte le premier prix au 5ème concours Giuseppe Ferlendis (2012), un deuxième prix au 41ème concours de l’IDRS (USA, 2012), un premier prix au 1er concours asiatique de l’IDRS (2011) ainsi que le deuxième prix du 9eme concours du Conservatoire de Pékin (2011).
Depuis 2021, Chi-Yuen est artiste chez Buffet Crampon, il joue sur le hautbois modèle « Légende ».
> Retrouvez l'interview de Bobby Cheng réalisée pour le concert Aïda
PRÉSENTATION DES ŒUVRES
Darius Milhaud (1892-1974)
Le Bœuf sur le toit, op. 58 (1920)
Durée : environ 20 minutes
Après les horreurs de la Première Guerre mondiale, la France se tourne vers l’insouciance et la légèreté. Le compositeur marseillais Darius Milhaud (1892-1974) n’échappe pas à la règle. D’ailleurs, son goût le porte très naturellement à ce lyrisme clair, franc, à cette vigueur saine qui feront tout le charme de sa musique.
L’œuvre orchestrale que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de Bœuf sur le toit était à l’origine une composition destinée à accompagner un film de Charlie Chaplin. Cette première mouture, intitulée Cinéma-Fantaisie, était composée pour violon et piano uniquement (1919). Quand il entre dans le « Groupe des Six », Milhaud accepte de se lancer dans un projet de ballet commun avec Georges Auric (qui compose alors Adieu New York) et Francis Poulenc (Cocardes). Sur la suggestion de Jean Cocteau, qui lui trousse la trame d’un argument, il reprend cette admirable musique et Cinéma-Fantaisie devient Le Bœuf sur le toit, du titre d’une chanson brésilienne – O Boi no telhado – qui la traverse de-ci de-là… Il est vrai que, çà et là, l’œuvre voit surgir des mélodies folkloriques incroyables, surtout pour une musique « savante » de l’époque : rumbas, tangos, fado s’y trouvent intégrés pêle-mêle, ce qui a sans aucun doute joué dans la fulgurante popularité de ces pages auprès du public le plus large. L’autre raison du succès de ce ballet-pantomime en fut certainement aussi son côté surréaliste : contrairement à ce qui se faisait alors, Milhaud et Cocteau refusent d’élaborer une histoire linéaire et se contentent de présenter des figures un peu foutraques (un bookmaker, un nain, un boxeur, un policier qui se fait décapiter par les pales d’un ventilateur… et ressuscite !), sans grand lien – si ce n’est celui du lieu où elles se meuvent : un bar de New York durant la prohibition. Il est vrai que le ballet n’était pas dansé par de simples danseurs, mais par des artistes pour la plupart venus du monde du cirque, dont les frères Fratellini, qui venaient alors de se faire connaître au sein du Cirque Médrano. L’œuvre fut créée avec ses consœurs Adieu à New York et Cocardes le 21 février 1920, à la Comédie des Champs-Élysées. Wladimir Golschmann était à la baguette. Les décors de Raoul Dufy firent autant sensation que l’insolence de la musique et sa formidable inventivité. Elle devait par la suite donner son nom à un cabaret parisien inauguré par Louis Moysès en 1922 [1], qui devait rapidement devenir le repaire de toute l’intelligentsia parisienne – et du Groupe des Six !
[1] Initialement sis rue Boissy d’Anglas, dans le 8e arrondissement de Paris, Le Bœuf sur le Toit déménagera plusieurs fois avant de s’installer rue du Colisée, également dans le 8e, où il existe aujourd’hui encore.
Jean-Jacques Groleau
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour hautbois en do majeur KV. 314 (1777)
1. Allegro aperto
2. Adagio non troppo
3. Rondo : Allegretto
Durée : environ 20 minutes
Soyez bien attentif au début du concert. Sur un signe du premier violon solo, le représentant de tout l’orchestre et que l’on salue au début de chaque concert, le hautbois se lève, regarde ses collègues et entonne une note immédiatement reprise par tout l’orchestre. Cette note fondamentale - un « la » - est la boussole de tous les musiciens car il décide de la couleur harmonique des œuvres à venir. C’est dire la responsabilité qui pèse sur les épaules du hautboïste soliste d’une formation symphonique. Ce soir, Bobby Cheng interprète une pièce qu’il connait par cœur depuis l’enfance : Le Concerto pour hautbois en do majeur de Mozart, un tube pour tous les hautboïstes qui le jouent régulièrement dans les conservatoires ou lors des concours d’orchestre. Il faut dire que cette pièce met particulièrement en valeur le timbre et le potentiel lyrique du hautbois. Elle a été écrite pour l’un des plus grands hautboïstes du 18e siècle à savoir l’Italien Giuseppe Ferlendis, éminent membre, tout comme Mozart, de la Chapelle Royale de Salzbourg. Après une rapide introduction joyeuse en forme de questions-réponses entre les cordes et les bois, le hautbois se lance immédiatement dans une grande note tenue qui traverse tout l’orchestre. Il faut du souffle et beaucoup de sang-froid pour tenir aussi longtemps cette note au tout début d’une œuvre ! Le hautboïste a intérêt à s’être bien échauffé, à avoir bien taillé, mouillé et préparé les deux anches en roseaux de son instrument. Deux petites lamelles qu’il pince de ses lèvres et qu’il met en vibration pour émettre un son. Ce système dit à « anches doubles » est ce qui donne au descendant de la flûte aulos de la Grèce antique ce son si perçant et pastoral. Une fois cette grande phrase tenue, le soliste nous fait entendre un mode de jeu caractéristique du hautbois : des notes piquées et rapides. Il faut aussi beaucoup de souplesse pour négocier les multiples ornements, crescendos et sauts d’intervalles parfois périlleux demandés par Mozart tout au long de l’œuvre. Comme dans un air d’opéra, le hautbois-chanteur se retrouve plusieurs fois seul à la fin des trois mouvements. Il interprète des solos très virtuoses et parfois improvisés par le musicien. Ce moment suspendu où l’orchestre se tait se nomme une cadence et c’est souvent l’un des passages les plus saisissants d’un concerto !
Georges Bizet (1838-1875)
Symphonie n°1 en ut majeur (1855)
1. Allegro vivo
2. Adagio
3. Allegro vivace
4. Allegro vivace
Durée : environ 30 minutes
Mozart a 21 ans lorsqu’il compose son concerto... Petit joueur ! Georges Bizet quant à lui n’a que 17 printemps quand il met un point final à son unique symphonie. Le premier chef-d’œuvre du père de Carmen est un petit bijou qui se souvient justement du classicisme et de l’élégance d’un Mozart. Bizet fait lui aussi appel à un orchestre léger pour nous donner à entendre une œuvre sans ombre. Les détails du lever de rideau de la symphonie auraient sans doute beaucoup plus à Mozart, Haydn et Beethoven ou le public de leur époque. On pense au grand accord autoritaire de do majeur, son déploiement sous la forme d’un arpège montant puis descendant, le jeu de question-réponses entre les bois et les cordes toutes les huit ou quatre mesures afin de donner un équilibre, une sensation de symétrie parfaite au temps musical etc. Après cette ouverture néoclassique le hautbois soliste revient sur le devant de la scène. Il interprète un thème gracieux en notes longues qui surnage le jeu plus rythmique et les ponctuations de l’orchestre. Le hautbois n’a pas le temps de souffler bien longtemps car il joue les premiers rôles dans le mouvement lent de la symphonie. Le hautbois prend des allures de narguilé et nous plonge dans un rêve orientaliste. En écoutant son thème composé d’une alternance de valeurs longues et de notes rapides ainsi que les cordes pincées qui l’accompagnent, on se croirait au milieu d’un tableau imaginaire de Delacroix dans lequel un joueur de zurna, le cousin turc du hautbois, chanterait des arabesques envoûtantes. Le troisième mouvement nous sort de notre torpeur et nous réveille à grands coups d’accords et de roulements de timbales triomphants. Les musiciens nous invitent à une danse traditionnelle et rustique. Tandis que l’on hésite à regagner notre siège une fois le mouvement terminé, les premières notes du finale nous convainquent finalement de rester encore un peu sur la piste de danse : dans un tempo d’enfer marqué par les contretemps des altos et des violons 2 ainsi que des coups de timbales bien placés, les premiers violons se lancent dans un thème d’une grande vitalité qui revient de manière lancinante comme le refrain d’une chanson populaire et sans paroles.
Max Dozolme
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